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Gas Bijoux Françoise

Quand Gas Bijoux rencontre Françoise

Gas bijoux Françoise

Johanna Senyk © Linda Mestaoui

Elles terminent les phrases l’une de l’autre. Et ont des fous rires contagieux. Quand Johanna Senyk et Marie Gas échangent, c’est avant tout leur grande complicité qui frappe. Les deux amies– respectivement fondatrice du label de prêt-à-porter Françoise ; directrice artistique de Gas Bijoux et fondatrice de By Marie – ont rassemblé leurs talents pour imaginer une capsule de bijoux de haute fantaisie. Elle est réalisée à Marseille, dans les ateliers historiques de Gas Bijoux qui célèbre 50 années de création. Réunies pour présenter le fruit de leur travail, elles échangent avec une grande complicité sur tout ce qui les passionne : le savoir-faire et l’intemporalité des pièces bien faites. Interview croisée, dans l’appartement parisien de Marie Gas, où il est question de bijoux, de pouvoir féminin et d’une amitié très vivante.

Par Inès Matsika

Photos: Linda Mestaoui 

Comment est venue l’idée de cette collaboration ?

Marie : C’est Johanna qui l’a formulée mais elle sonnait comme une évidence. Nous avons beaucoup de respect pour le travail l’une de l’autre. Il fallait un jour que nos univers se rencontrent. C’est chose faite.

Qu’est ce qui vous plaît tant dans les années 70, une période à laquelle Françoise rend hommage et que vous explorez ensemble dans la capsule de bijoux ?

Johanna : La mode étant cyclique, il y a des décennies que je préfère revisiter, et les années 70 sont un vivier dans lequel il est amusant de puiser. J’aime la liberté stylistique de cette période, en terme de matières, de couleurs et d’imprimés. Les comportements étaient aussi plus libres. Aujourd’hui, on ne peut plus boire, fumer, bronzer…Il y a beaucoup d’interdits ! C’est plus triste.

Marie : C’était une mode sans compromis, culottée et qui frôlait parfois l’exubérance. J’aime l’idée de ces « dérapages très contrôlés ».

Comment s’illustre cette inspiration dans la capsule Gas Bijoux x Françoise ?

Johanna : Dans les ateliers de Gas Bijoux à Marseille, il y a 50 ans d’histoire accumulés dans des boîtes. Des pièces chinées depuis les débuts de la maison sont conservées dans les tiroirs. Il m’a suffit de les ouvrir pour trouver des trésors qui dataient des années 70. Avec Marie, nous avons sélectionné des modèles que nous avons revisités pour la capsule.

Marie : Faire un clin d’œil aux années 70 n’était pas le point de départ de la collection. C’est en découvrant ces pièces que la direction à prendre s’est imposée. On a eu envie de brouiller les pistes et ne pas proposer une interprétation littérale. Johanna s’est complètement fondue dans le paysage de l’atelier. J’ai adoré la voir circuler librement et travailler aux côtés des artisans. Je lui ai laissé carte blanche car elle était très à l’aise. Il était inutile de trop intervenir.

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Gas bijoux Françoise

Marie Gas © Linda Mestaoui

Gas Bijoux Françoise

© Linda Mestaoui

Gas Bijoux Françoise

© Linda Mestaoui

Gas bijoux Françoise
Gas Bijoux Françoise
Gas Bijoux Françoise

Y-a-t-il un goût que vous ne partagez pas et qui a pu donner lieu à débat lors de ce projet ?

Johanna : Non, rien de fondamental. Avec Françoise, j’aime jouer sur les proportions. Je n’hésite pas à en rajouter. Marie a une « patte » plus délicate, elle travaille ses bijoux tout en finesse.

Marie : Je n’avais pas de doute sur notre capacité à harmoniser nos styles. On est tombé d’accord pour proposer des pièces oversized. Des modèles que Gas Bijoux, en temps normal, n’oserait pas faire (rires). C’était très intéressant d’adopter une approche plus couture du bijou.  Avec les matières fabuleuses trouvées à l’atelier, les mains des artisans et notre énergie créative, la magie a vraiment opéré.

Vous êtes toutes deux sensibles au savoir-faire, et la capsule a été réalisée au sein des ateliers de Gas Bijoux. Qu’est ce qui vous émeut le plus dans l’intervention de la main de l’homme sur la matière ?

Johanna : L’accident apporte des choses charmantes qu’il faut savoir conserver. Ce qui m’a vraiment frappée lors de cette expérience, c’est la flexibilité qu’offre les ateliers Gas Bijoux dans le processus de fabrication. Presque tout se construit sur place et l’on peut corriger au fur et à mesure les modèles. C’est une souplesse qui est assez rare. Cette maison est une des seules qui fabrique en France et qui détient ce savoir-faire là. Je n’aurai pas obtenu la même qualité ailleurs. C’est très précieux.

Marie : J’aime la notion de métier que l’on apprend au sein des ateliers Gas Bijoux et qui se transmet de génération en génération. Cela donne du sens à la marque. Je n’aurais jamais été à l’aise dans un processus industriel.

C’est la première fois que vous croisez vos talents dans un projet créatif. Quelle est la compétence que vous appréciez le plus, l’une chez l’autre ?

Johanna : Chez Marie, j’admire sa double casquette de créatrice et d’acheteuse (en tant que fondatrice du concept store By Marie, Ndlr). Elle sait accueillir la créativité, même quand elle déborde, et la canaliser pour obtenir le bon produit. J’ai été touchée par sa douceur et sa bienveillance. Elle et son père – André Gas, le fondateur de Gas Bijoux, Ndlr – m’ont accordée leur confiance. André reste le gardien du temple qu’il a construit il y a 50 ans, et il n’ouvre pas les portes à tout le monde.

Gas Bjoux Françoise

© Linda Mestaoui

© Linda Mestaoui

Marie : Johanna a une folie de vie qui est très inspirante. Elle ose tout, tout le temps. Et elle nous embarque dans cet élan !

Après des années d’amitié, est-ce que vous arrivez encore à vous surprendre. Et est-ce que ce fut le cas durant cette collaboration ?

Marie : Je ne pensais pas que Johanna était aussi rapide dans son processus créatif. Tout a été très vite ! Sinon, j’ai été heureuse de ne pas avoir à gérer un égo. Cela ne m’a pas surprise mais ça a confirmé ce que je pressentais (rires).

Dans la vie, qu’avez-vous appris l’une de l’autre ?

Johanna : Marie et moi sommes assez similaires. Nous sommes deux femmes très autonomes, des créatives qui gèrent des entreprises et écoutent beaucoup leur instinct. On va dans le même sens.

Marie : On a des tempéraments différents – Johanna est beaucoup plus expansive que moi – mais on partage les mêmes valeurs. Dans la vie, on s’est plutôt reconnu qu’autre chose. On a enrichi notre amitié à travers cette capsule. Nous sommes toutes les deux passionnées par notre travail. Quoi de mieux que de travailler avec des gens qu’on aime ?

Est-ce que vous ressemblez aux femmes que vous aviez imaginées ?

Marie : Récemment une amie d’enfance m’a rappelé des phrases que j’avais prononcées jeune. Je voulais trois choses : monter les marches du Palais de justice (Marie a fait des études de droit avant de lancer By Marie, Ndlr), intégrer l’Opéra de Marseille et lancer une ligne de vêtements. J’ai réussi à faire tout cela ! Mais ce ne fut pas fluide. J’ai longtemps cherché quelle femme j’allais devenir.

Johanna : Je suis et je reste une personne combative. Je me bats sur tous les fronts et je pars du principe qu’il n’y a rien qui ne me soit inaccessible. Dès que je me donne un objectif, je l’obtiens. Si la porte est fermée, j’enfonce les murs (rires). J’ai une liste d’objectifs et c’est ce qui me stimule au quotidien.

 

Gas Bijoux Françoise

© Linda Mestaoui

Vous êtes deux femmes d’expérience qui évoluez dans une industrie en pleine mutation. Comment le vivez-vous ?

Marie : Je souhaite ardemment que l’industrie de la mode se remette en question. Je ne comprends pas ce système de promotions systématiques. Elles sont destructives de valeur, tant au niveau de l’argent que de la créativité. Je ne peux pas dire à mes artisans que leurs gestes – précis et délicats sur des bijoux – ne valent plus rien deux mois après leur mise en vente ! Je milite pour que le bijou reste un objet intemporel, qui dure. Il ne doit pas subir le rythme des saisons. En 50 ans, chez Gas Bijoux, il nous est arrivé de rééditer des pièces qui n’avaient pas pris une ride, comme la croix émaillée réalisée par mon père. Je suis sûre que la capsule avec Françoise durera aussi dans le temps.

Johanna : Je rejoins Marie sur la question de l’intemporalité. Quand on fait des pièces qui ont du style – et non pas à la mode – et qui sont bien façonnées, elles peuvent suivre les gens longtemps dans leur vie. C’est ce que j’ambitionne de faire avec Françoise. Nous devons réapprendre à produire peu et à tout miser sur la qualité des pièces.

Vous avez pris un plaisir évident à travailler ensemble. Y-a-t-il un autre projet commun ?

Johanna et Marie (ensemble) : On n’a pas le temps ! (rires).

Johanna : Je dois sortir une collection en septembre et le challenge est énorme, vu le contexte actuel. La crise sanitaire limite encore beaucoup les choses.

Marie : Et moi, je dois faire patienter la cliente de By Marie qui attend les prochaines créations Françoise ! (rires). On a bien une idée en tête. Mais pour l’instant, on la laisse dans les cartons !

À écouter : Marie Gas se raconte dans un podcast

 Capsule en série limitée, disponible sur www.bymarie.com 

Gas Bijoux Françoise

© Linda Mestaoui

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