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Alexandra Golovanoff

Alexandra Golovanoff remet les Tricots au goût du jour

 Je suis une fille qui fait des pulls C’est ainsi que se présente Alexandra Golovanoff, avec une pointe de malice. Celle dont le CV court pourtant sur des kilomètres, y a ajouté une dernière ligne en lançant il y a trois ans sa marque Alexandra Golovanoff Tricots. Connue pour passer au crible les tendances dans son émission culte La mode, la mode, la modediffusée sur Paris Première- la journaliste quitte son poste d’observation pour donner sa définition de l’élégance. Elle se concentre autour d’une pièce, le pull en cachemire, et d’autres essentiels, tous imaginés dans des couleurs cosmétiques. Au tourbillon de la mode, la créatrice a préféré des valeurs sûres, qui racontent une part de son héritage familial. Rencontre avec une femme au style affirmé et à la tête bien faite, dans sa première adresse parisienne.

Par : Inès Matsika

Photos : @insidefashionplaces / Silhouettes: DR

Alexandra Golovanoff

Alexandra Golovanoff

Alexandra Golovanoff

En se penchant sur votre parcours, on comprend que vous avez eu plusieurs vies professionnelles. Costumière, employée dans la finance, journaliste et aujourd’hui créatrice. Qu’est ce qui relève du plan et que devez-vous au hasard ?

Ni l’un, ni l’autre. J’ai un caractère qui prédispose à ce genre de revirement. Je suis extrêmement curieuse. Je cultive depuis toujours un goût pour le changement, pour la prise de risques, pour une forme de vie bondissante. Je ne me suis pas interdit de passer d’un domaine à un autre.

Cette capacité à se réinventer, est-ce aussi une façon d’affirmer votre liberté ?

Absolument. C’est un choix de vie à chaque fois. Avec des expériences plus réussies que d’autres. Quand on est curieux, on s’expose à être déçu, à échouer ou à ne pas aimer ce que l’on fait. Mais tout ce que l’on entreprend est enrichissant ! Je n’ai jamais expérimenté la sécurité professionnelle telle que les gens la connaissent : le confort de la grande boîte, le salaire qui va avec, les tickets restaurants… C’est plus facile de ne pas céder sur la liberté quand on n’est pas en quête du confort.

J’ai lu que vous définissiez l’aventure Alexandra Golovanoff Tricots comme une prise de risques ? En quoi était-il important de vous jeter à l’eau avec un projet personnel ?

J’ai toujours eu l’impression d’être en service commandé en travaillant pour les autres. J’ai accompli ces missions sans problème car c’était passionnant ! Mais à un moment, j’ai ressenti le besoin de m’exprimer en mon nom. On a tous un réservoir de créativité et si l’on ne puise pas dedans, il déborde. Je portais ce projet en moi depuis longtemps et il a fallu le faire éclore, sinon je ne me serais pas réalisée.

Alexandra Golovanoff Tricots est une prise de risques car cette aventure est devenue ma priorité. J’y ai mis tout ce que j’aime, tout ce que je suis, jusqu’à mon nom. Je m’expose ! C’est aussi un risque entrepreneurial en embauchant des gens et en engageant des investissements.

Alexandra Golovanoff
Alexandra Golovanoff
Alexandra Golovanoff
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3 ans après, comment vivez-vous votre statut de chef d’entreprise ?

Je le vis bien car je ne suis pas seule. Dans tous les métiers que j’ai exercé, la notion de groupe a toujours été importante. C’est génial d’architecturer un projet avec des gens qui apportent chacun leur pierre à l’édifice. Je ne suis pas forcément la plus douée pour le management d’équipe, mais il y a un noyau solide qui s’est construit et c’est motivant.

 Vous avez construit votre marque autour du pull en cachemire, qui est un basique. Que cela révèle-t-il de votre approche de la mode ?

Petite précision lexicale (rires). Je n’ai pas de problème avec le mot basique – car il désigne les pièces incontournables de la garde-robe – mais dans la bouche de la plupart des gens il devient péjoratif. Je lui préfère donc le terme essentiel. Pour Alexandra Golovanoff Tricots, je suis effectivement partie d’une pièce essentielle, confortable et chaleureuse. J’avais envie que l’on se sente bien dans mes créations quand on les enfile.

Le choix du pull, comme produit central de la marque, n’est pas un hasard. J’en porte depuis le premier jour de ma naissance car ma mère a toujours tricoté, et elle le fait encore aujourd’hui. J’ai une relation charnelle à cette pièce. Même si je tricote mal, je sais comment on fait. Et il était essentiel que je comprenne la conception de mes produits.

Expliquez-nous en quoi les couleurs sont les signes distinctifs d’Alexandra Golovanoff Tricots.

Les couleurs sont centrales. Elles sont la valeur ajoutée des modèles. J’en suis dingue et c’est pour ça qu’il y en a autant car il est difficile pour moi de choisir (rires). La bonne couleur embellit et flatte un visage. Elle est aussi efficace qu’un make-up réussi. Ça semble bête, mais tout le monde ne le sait pas. Je fais en sorte que mes pulls, choisis dans le coloris adapté, aient cette vertu.

Alexandra Golovanoff
alexandra golovanoff

Quels ont été vos choix pour la fabrication des modèles ?

Mes modèles partent d’un fil. Avec des aiguilles et des machines, on va les tricoter pour aboutir à des produits finis, confectionnés avec un seul matériau. Et ça, ça me fascine ! Les possibilités sont infinies et dépendent du nombre de fils utilisés, de la manière dont on les tend, de la taille des aiguilles….En fonction des paramètres que l’on choisit, on va à chaque fois obtenir des pulls différents.

Quelle part de vous-même infusez-vous dans vos créations ?

Je dessine, je choisis les couleurs, je fais les prototypes et je les essaie. Il y a peut-être trop de moi dans Alexandra Golovanoff Tricots (rires). Mais j’essaie de penser aux autres aussi. Mes modèles sont faits pour différentes morphologies. Je fais attention à ce que les corps, dans leur diversité, puissent bien les épouser.

Et quelle place la famille –celle que vous avez construite et celle dont vous êtes issue- a–t-elle dans cette aventure ?

Mes parents, mes deux sœurs, mon mari et mes deux enfants participent activement au projet. Ma mère pose dans tous nos catalogues car elle est très belle et qu’en m’ayant transmis sa passion du tricot, elle est à l’origine de la marque. Par ailleurs, je ne m’adresse pas à une génération en particulier. Un pull, c’est fait pour tout le monde et à tout âge. Mes premières créations portent le nom de mes proches. C’est aussi une façon de leur dire que je les aime.

 

 

Alexandra Golovanoff
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Vous avez des parents antiquaires. Quelle notion du temps vous ont-ils transmis et comment se reflète-t-elle dans la philosophie de la marque ?

Pour moi, les objets doivent perdurer. Mes créations sont donc conçues pour vivre 20 ans. Elles ne sont pas jetables. Je porte encore des vieux pulls de mes parents en cachemire écossais et ils sont parfaits.

Pour finir, je vais m’adresser à la journaliste mode. Citez-moi trois événements ou évolutions qui vous ont le plus marquée dans le milieu de la mode ces dernières années ?

Quand je suis arrivée dans ce milieu, c’était le début du règne des marques. Des notions comme le it bag sont apparues. On nous faisait croire qu’on avait absolument besoin de ces pièces-là. Il y avait un engouement massif pour des produits, soutenu par la presse.

On a ensuite assisté à la mondialisation des groupes de luxe et à la guerre financière qui s’est déclenchée entre eux. Ça a changé tout le paysage de la mode. Le troisième événement, c’est internet et des outils comme Instagram qui ont accompagné la mondialisation du marché. Aujourd’hui, grâce à ce réseau, toute marque peut s’adresser au monde entier. Le seul problème, c’est que le gâteau à se partager n’est pas extensible à l’infini. Et qu’il faut désormais convaincre pour qu’une personne choisisse notre produit, plutôt que celui d’un concurrent. Toute la question réside dans la manière dont on attrape les potentiels clients.

Faire émerger une marque sur Instagram est un job à part entière, qui prend un temps fou. J’ai la chance d’avoir longtemps travaillé dans le métier de l’image et donc d’être à l’aise pour en jouer sur les réseaux sociaux, même si ça ne m’amuse pas tous les jours !

Alexandra Golovanoff Tricots, 5 rue de Varenne, 75007 Paris. www.alexandragolovanoff.com

alexandra golovanoff
Alexandra Golovanoff

Alexandra Golovanoff, entourée de sa fille et de sa mère

L’héritage mode d’Alexandra Golovanoff

Votre première émotion tricots

À chaque retour de voyage, mes parents avaient l’habitude de rapporter pour leurs trois petites filles un cadeau, souvent des vêtements. Je me souviens d’un pull irlandais, dans des couleurs ravissantes. Mes soeurs et moi étions tellement contentes en les voyant. Mais en les enfilant, mauvaise surprise : ça grattait tellement !

Un personnage ou une personne qui a influencé votre style

Je n’ai pas de muses. Je ne fais pas des moodboards avec des images de Christina Onassis et Jane Birkin. Mais en revanche, je pense que s’impriment sur mon cerveau des catégories de femmes que je trouve chics, dont j’aime l’immense simplicité.

Une odeur liée à un souvenir mode

Plusieurs odeurs sont liées à des gens que j’ai fréquentés. Je pense en premier à Karl Lagerfeld. Un jour, nous étions ensemble dans son bureau et il n’arrêtait pas de jouer avec une bouteille de parfum. Quand je l’ai interrogé, il m’expliqua qu’il s’agissait du meilleur parfum pour les femmes et les hommes  (elle imite son accent). Et il en pulvérisa sur moi ! C’était Boy de Chanel. Et je suis restée avec cette odeur qui m’a poursuivie longtemps.

Les designers qui vous ont donné envie d’être créatrice

Il y a des gens auxquels je pense quand modestement je dessine. Karl Lagerfeld m’a tellement dit de choses qu’il continue à parler dans ma tête et je m’adresse à lui quand j’ai un problème. Il y a aussi Nicolas Ghesquière que j’ai beaucoup observé et dont j’admire le travail. Et Pierre Hardy, un créateur très proche de moi.

Pour découvrir le clin d’oeil d’Alexandra Golovanoff en vidéo, c’est ici

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